L’incroyable Maison- Musée d’Ousmane Sow

Art Kelen
4 min readJan 21, 2019

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Ousmane Sow, “Nouba debout” et “Couple de lutteurs corps à corps” aux Fonderies de Coubertin © Béatrice Soulé / Roger Viollet / ADAGP

Lors de mon dernier séjour à Dakar, j’ai eu la chance de visiter la maison Ousmane Sow, le célèbre sculpteur décédé le 1er décembre 2016.

C’est en 1999 que j’ai découvert ses œuvres colossales exposées sur le pont des Arts à Paris. Y étaient exposées les séries africaines et la série la « bataille de Little Big Horn » qui ont attirées près de trois millions de visiteurs.

A l’époque j’avais été impressionnée par ces statues monumentales mais ne connaissant ni la signification, ni l’histoire des œuvres, je n’en avais pas perçu la puissance.

La visite guidée par sa fille Marina Sow et la découverte du lieu dans lequel il a vécu et travaillé donnent une dimension autre à cet immense artiste et à ses gigantesques sculptures.

De kinésithérapeute à sculpteur

Ousmane Sow est né en 1935 à Dakar. Enfant, il taillait des figurines dans des blocs de calcaire trouvés sur la plage. C’est à 21 ans, à la mort de son père duquel il a hérité la rigueur, le sens du devoir et le refus des honneurs qu’il part pour Paris. Il y fera de petits boulots avant de passer un diplôme de kinésithérapeute.

Il exercera ce métier jusqu’à cinquante ans, moment où ses sculptures révélées lui vaudront le succès. Sa formation de kinésithérapeute et sa parfaite connaissance de l’anatomie sont intensément perceptibles dans ses œuvres.

C’est donc à partir de 1987 qu’il se consacre entièrement à son art avec sa première exposition organisée par le Centre Culturel Français de Dakar. Il y exposera ses fameux lutteurs Nouba, ethnie du sud Soudan. Il en dira la chose suivante :

«Je dis les choses comme elles doivent être dites… Je fais comme tous les artistes que j’aime : Rodin, Giacometti ou Maillol : j’exagère !…. Ce qui m’intéresse, ce n’est pas la bataille, c’est l’opposition, le corps à corps, qu’il soit réel ou mental… Il n’y aucune logique dans mon œuvre, seule ma sensibilité me guide.»

Nouba, les lutteurs aux bâtons

Suivront les séries de sculptures suivantes: “Les Masai” en 1988, “les Zoulou” en 1991 et “les Peulh” en 1993 mais aussi « La bataille de Little Big Horn » ,une série de onze chevaux et vingt-quatre personnages.

Dans les années 2000, il réalisera également plus de quatre-vingts bronzes.

Ousmane Sow est le premier africain à intégrer l’Académie des Beaux Arts, fierté pour son continent. Son œuvre a été exposée dans plus d’une vingtaine de lieux, dont le Whitney Museum à New York.

Le Sphinx, maison née de son imagination, préfiguration de sa série sur les égyptiens.

Ousmane Sow a construit sa maison de ses mains, comme une sculpture : une véritable oeuvre d’art avec ses carrelages dans des tons ocres, bruns et rouges mais également avec les murs recouverts de la matière qu’il utilisait pour ses sculptures.

La visite commence avec une photo de Ousmane Sow, très bel homme au sourire radieux qui illumine les lieux.

Sont exposées les séries des œuvres africaines dans chacune des pièces. Pour les séries incomplètes, les photos des statues manquantes sont présentées donnant une vue globale de la série.

La série qui m’a particulièrement impressionnée et touchée est celle « des grands hommes » en hommage aux grands hommes qui ont marqué sa vie. On y découvre les sculptures de son père Moctar Sow, de Victor Hugo, du Général de Gaulle, de Nelson Mandela et L’Homme et l’enfant. Derrière ces œuvres majestueuses, on devine des thèmes qui devaient être importants pour cet homme, comme l’héroïsme et le courage, la liberté et la compassion.

Série les grands hommes, Victor Hugo

Des archives et souvenirs plus personnels sont également présentés dans une pièce (son agenda, très original sous forme de cercles, des photos privées de Henri Cartier-Bresson, son vélo fétiche, son épée d’académicien…). Le pommeau de cette épée, qu’il a réalisé lui-même pour son entrée à l’Académie des Beaux-Arts en 2003, représente un nouba effectuant un saut.

L’atelier dans lequel il a travaillé les dernières années de sa vie est également visible au dernier étage de la maison.

Si vous êtes à Dakar, je vous recommande vivement de visiter cette maison musée, véritable lieu de transmission et de partage grâce au travail remarquable de la famille du sculpteur.

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Promotion de l’Art Africain

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