Rencontre avec le danseur engagé Lucas Katangila

Art Kelen
4 min readOct 27, 2020

Pourriez-vous vous présenter?

Je suis un danseur, chorégraphe, performeur et activiste congolais vivant à Bruxelles. Avec mes activités artistiques, je souhaite rassembler les gens, partager des styles de danse de différentes cultures à travers le monde et contribuer à une Afrique unie du centre à l’Est, du Sud à l’Afrique du Nord et à l’Europe.

Comment s’est passé votre première rencontre avec la danse ?

Je viens d’une famille d’artistes descendant du roi Katangila qui était mon grand père (le Roi Katangila fut roi Roi du village de Ufamandu, roi de la tribu tembo, les chasseurs d’éléphants). Ma première rencontre avec la danse a été à l’âge de six ans.

Comment votre entourage a accueilli cette passion?

Mon entourage n’a eu aucun problème avec mon enthousiasme pour la danse, mis à part quelques personnes qui n’ont aucune connaissance en matière d’art. Très tôt, j’ai pris ma passion au sérieux avec une idée bien précise du chemin que je souhaitais prendre. Avec ma détermination, tout le monde a compris qui j’étais et a accepté ma passion.

Quel a été votre parcours ?

Ma première école de danse est, en fait, la troupe de danse traditionnel Mboka, créée par mon grand père. J’y ai tout appris et c’est une grande source d’inspiration. J’ai intégré L’Académie des Beaux Arts de Bruxelles où j’ai suivi les cours d’art et de chorégraphie.

J’ai côtoyé plusieurs chorégraphes de renommée mondiale comme Nicola Ayoub, Marco Torrice , Louise Vannest et tant d’autres… J’ai dansé pour plusieurs compagnies de danse en Afrique et en Europe.

Qu’est-ce que la danse vous apporte ?

La danse m’apporte la paix et la joie. Quand je danse je respire, je vis, je me sens libre. C’est aussi pour moi une arme pour combattre le mal et faire passer un message. Pour moi, la danse est un pont capable de réunir deux monde en conflits. Elle est aussi un message pour la voix des sans voix, un tunnel qui me connecte avec mes ancêtres… Bref la danse m’apporte la vie!

Pourriez-vous nous parler de votre engagement vis-à-vis de la RDC?

Mon engagement pour la RDC se focalise sur le Kivu-Est de la RDC à Goma, ma ville natale, encore appelée zone rouge, à cause de la guerre politique toujours en cours et de l’enrôlement des enfants dans l’armée. Ce scandale n’est toujours pas condamné par notre gouvernement à cause d’intérêts politiques et de la mondialisation. Pour eux, le peuple ne compte pas. Une femme est violée chaque seconde et personne n’en parle. Il n’y a ni accès à l’éducation, ni à la santé. Il n’y a ni eau potable, ni électricité alors que ce pays est riche de ressources naturelles. Les enfants sont contraints de travailler jour et nuit dans les mines de coltan.

Mon rêve est de construire un espace pour tous les jeunes du Congo assoiffés d’art où ils pourront s’exprimer et faire entendre leurs voix à travers la danse, le dessin, la poésie et l’écriture… Créer un espace de danse et un théâtre serait une consécration.

Est-ce que vous y retournez souvent?

Cela fait un moment que je n’y suis pas retourné. Il est vrai que ma famille me manque ainsi que mes amis mais, avec la guerre et l’insécurité, en tant qu’artiste je crains de me jeter dans la gueule du loup. Je dénonce des injustices et des magouilles, donc je ne sais pas ce qui pourrait m’arriver. Je souhaite vraiment retourner un jour dans un pays en paix et non en guerre. Je sais que le Congo changera un jour et ça sera mon paradis!

Quels sont vos projets en cours?

Je travaille sur plusieurs projets solo comme, par exemple, “Ndoto” (ou rêve) qui vient de remporter le Roel Vernier Prijs Award Belgium 2020 (Het theater Festival) en tournée. Vidéo

Un autre projet solo s’intitule “La veste du président , Xénophobie et Sex freedom”.

Je suis également dans plusieurs créations de chorégraphies internationales comme “9 Forays” de Louise Vannest, “East African Boléro” de Wesley Ruzibiza, “Melting Pot Dance Practice” de Marco Torrice, “Dolce Notte” de Shelbatra Jashari, et plusieurs créations en cours avec ma Compagnie Planet Slayers.

Je suis directeur artistique de Mboka Dance Cie où je travaille également sur des projets avec d’autres artistes activistes.

Retrouvez Lucas Katangila sur instagram

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